L’alcoolémie au taux délictuel (administratif) - Fain Avocats
L'alcoolémie au taux délictuel (administratif)
Outre les sanctions pénales qu’il engendre, le délit de conduite sous l’empire d’un état alcoolique (concentration d’alcool dans le sang supérieure ou égale à 0,80 gramme/litre ou dans l’air expiré supérieure ou égale à 0,40 mg/litre) fait l’objet de « sanctions » administratives, c'est-à-dire édictées par le Préfet et non par le juge. Ces décisions, destinées en partie à protéger l’ordre public, encadrent la procédure pénale et s’appliquent en parallèle à cette dernière.
La suspension provisoire du permis de conduire (L.224-1 du Code de la Route)
C’est une mesure destinée à priver immédiatement de son permis le présumé coupable du délit de conduite sous l’empire d’un état alcoolique (ou assimilé), dans l’attente de la sanction pénale à intervenir (cette dernière étant quand à elle prononcée par un juge) .
En pratique ce retrait de permis intervient en deux étapes :
- La rétention provisoire du permis de conduire (L.224-2 du Code de la Route)
Dès lors qu’elles ont constaté qu’un titulaire du permis de conduire avait conduit malgré un taux d’alcool supérieur à la limite délictuelle¹, les forces de l’ordre² procèdent immédiatement et systématiquement à la rétention provisoire du permis de conduire. On parle alors de rétention « à titre conservatoire ». Cette rétention est accompagnée de la remise au contrevenant d’un « avis de rétention provisoire du permis de conduire ».
La retrait provisoire du permis de conduire ne peut durer plus de 72 heures sans que le Préfet du département n’ait, dans ce même délai, décidé de prononcer une suspension du permis de conduire à titre provisoire.
En pratique, cela signifie que si l’automobiliste ne s’est pas vu remettre d’avis de suspension administrative de son permis de conduire à l’issue de ce délai, soit directement par les forces de l’ordre , soit par courrier recommandé, il est en droit de récupérer son permis de conduire et de reconduire, dans l’attente de la décision qui sera ultérieurement prise par le magistrat qui se prononcera nécessairement sur son cas.
Attention : Le Préfet peut très bien décider de suspendre le permis de l’intéressé dans le délai de 72 heures MAIS ne lui notifier que plus tardivement. Dans ce cas, le conducteur en cause ne pourra pas se voir remettre de permis dans l’intervalle. Il est cependant, dans cette situation, en droit de conduire à nouveau, dans l’attente de cette éventuelle notification³.
Concernant la suspension elle-même, on remarquera que :
- Sa durée maximale est de 6 mois. Si le juge ne s’est pas encore prononcé à la date ou la suspension prend fin, le conducteur concerné pourra récupérer son permis et conduire dans l’attente de son jugement.
- Les services de la préfecture prennent en compte la gravité de l’infraction ainsi que le passé du conducteur en cause pour définir la durée de la suspension (elle n’est jamais inférieure à 15 jours en pratique).
- La suspension préfectorale du permis se déduira de la suspension qui pourra être prononcée plus tard par le juge.
Par exemple : Une personne ayant vu son permis suspendu pour 5 mois à titre provisoire et qui est condamné par le juge à une suspension de 12 mois n’aura plus en réalité qu’à « purger » une suspension de (12-5) 7 mois.
Dès lors que la sanction pénale est définitive (si aucun appel n’en est fait ou si le délai d’appel a expiré), la seconde conséquence administrative de l’infraction va s’appliquer.
Le retrait de points du permis de conduire après une alcoolémie délictuelle
La perte de points du permis de conduire est une conséquence automatique d’une décision du juge pénal, lorsque l’infraction qui est punie entraine, selon la loi, un retrait de point.
Selon l’article L.234-1 IV du Code de la Route, les délit de conduite sous l’empire d’un état alcoolique ou en état d’ivresse manifeste « donnent lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre maximal de points du permis de conduire », soit 6 points.
Remarque : Depuis une loi 11 juillet 2003, il en va de même s’agissant de l’alcoolémie au simple taux conventionnel (concentration d’alcool dans le sang comprise entre 0,5 et 0,8 gramme par litre de sang).
Ainsi, bon nombre d’automobilistes se croient à l’abri d’un retrait de point lorsqu’ils sont jugés, car ni le juge, ni le jugement ou l’avis de condamnation pénale qui lui font suite ne mentionnent la perte de points. Pire, certains tribunaux laissent entendre que cette perte de point n’est pas systématique, alors que c’est pourtant le cas !
En effet, c’est le rôle du Fichier National du Permis de Conduire (F.N.P.C) (service du Ministère de l’Intérieur), que d’enregistrer ce retrait de points, conséquence mécanique et automatique d’une condamnation concernant une infraction entrainant un retrait de points.
Finalement, personne ne prend donc la décision de retirer des points sur le permis de conduire de quelqu’un…hormis le législateur.
Attention : Le F.N.P.C n’enregistre très souvent la perte de points sur le relevé de points que longtemps après la condamnation définitive (plusieurs mois, voire années). Cela contribue à la surprendre le contrevenant, pensant avoir payé sa dette. L’impression laissée et alors celle d’une double peine. C’est pour cette raison que l’information préalable à la perte de points est une condition de validité de cette dernière : c’est avant de perdre des points que l’État doit informer l’automobiliste.
¹ Mais pas uniquement puisque les cas de conduite en ayant fait usage de stupéfiants (cannabis, Cocaïne…etc), en état d’ivresse manifeste ou de refus de se soumettre aux contrôle d’alcoolémie donnent lieu à une procédure de retrait de permis de conduire équivalente. ² Par exemple au sortir de sa garde à vue. ³ C’est le rôle d’un avocat spécialisé dans les permis de conduire que de trouver une solution à ce type de difficultés.