Cessation d’activité d’une filiale : un motif économique de licenciement? - Fain Avocats

Par un arrêt rendu en date du 18 janvier 2011, la chambre sociale de la Cour de Cassation vient rappeler les limites de la cessation d’activité d’une entreprise. En l’espèce, une filiale cède à sa société mère l’ensemble de ses services implantés à Rungis. Les salariés qui y étaient rattachés passent sous la direction de la société mère. Le comité central d’entreprise ainsi que les syndicats contestent ce transfert. Les juges font droit à leur demande estimant que les conditions de l’article L. 1224-1 du Code du travail portant sur le transfert automatique des contrats de travail en cas de fusion, cession etc, n’étaient pas remplies. La filiale a alors proposé aux salariés rattachés au service de Rungis d’accepter un changement volontaire d’employeur. Les salariés ayant refusé sont demeurés des salariés de la filiale mais ne se sont vus fournir aucun travail, tout en étant payés. Un an plus tard, la filiale licencie tout son personnel pour motif économique après avoir conclu un accord de méthode, accord négocié avec les partenaires sociaux lorsque l’employeur envisage de licencier plus de dix salariés sur une période de trente jours. Les salariés licenciés assignent la filiale mais également la société mère en tant que co-employeur devant le Conseil des prud’hommes en paiement des indemnités.

Les juges prud’homaux mettent hors de cause la société mère. La cour d’appel infirme cette décision. La société mère se pourvoit en cassation aux moyens que la cour d’appel n’a pas caractérisé « une confusion d’intérêts, d’activités et de direction entre les deux sociétés » pour qualifier la société mère de « co-employeur » et que la décision de mettre fin aux activités de la filiale ne provenait que de son directeur général. En outre, la société mère considère que la cour d’appel n’avait pas à vérifier la légitimité de la cessation d’activité comme étant une cause de licenciement économique.

La Cour de Cassation rejette le pourvoi au motif que, comme l’a énoncé la cour d’appel, l’activité économique de la filiale était complètement dépendante de celle de la société mère, que le capital de la filiale était presque entièrement détenu par la société mère qui dictait les décisions importantes de sa filiale. Par ailleurs la société mère est intervenue à maintes reprises dans la gestion financière et sociale de sa filiale, notamment dans le cadre du licenciement du personnel. Enfin, la cessation d’activité de la filiale ne constitue pas un licenciement économique puisqu’elle ne résulte que de « choix stratégiques décidés au niveau du groupe ».

La Cour de cassation fixe donc les limites de la cessation d’activité. Celle-ci ne sera considérée comme étant une cause réelle et sérieuse de licenciement pour motif économique que si la société connait de réelles difficultés économiques ou agit en raison de la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise ou du groupe.

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