Stupéfiants au volant : pire que l’alcool ! - Fain Avocats

Dans le Code de la Route, les articles qui interdisent la conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique fixent des taux d'alcool (dans le sang et l'air expiré) au delà desquels il n'est pas permis d'aller. Toutefois, la simple présence d'alcool dans le sang n'est pas, en elle même , prohibée. Il en va de même au regard des traces d'alcool (on pense ici aux célèbres Gamma GT). Cela n'est pas le cas des stupéfiants, et en particulier du Cannabis. En effet, la loi interdit tout simplement de conduire après avoir "fait usage" de stupéfiants, sans distinguer le taux de produit contenu dans le sang au moment du contrôle, ni même la date et l'heure de cette consommation, par rapport au fait d'avoir pris le volant.

Sans surprise, l'interprétation de cette loi par la Cour de Cassation, s'est avérée rapidement stricte. Dans un arrêt de 2008, la Cour avait déjà indiqué qu'il n'était pas important de s'intéresser au moment de la consommation, ni au taux et formulation chimique de produits contenus dans le sang.

Cette position, aisément compréhensible au regard du caractère interdit de ces substances et du fléau qu'elles représentent, n'était toutefois pas exemptes de reproches au plan logique.

C'est ainsi que certaines juridictions du fond ont résisté (et le font encore) à cette jurisprudence trop ferme en opérant une distinction, facilitée par les rapports d'études toxicologiques (toxlab), entre le conducteur sous l'influence directe du principe actif et celui qui ne l'est plus. En effet, il est techniquement possible aujourd'hui de savoir si le cannabis a été consommé plus ou ,au contraire, moins de 6 heures avant la prise de sang.

Dans cette voie, la Cour d'appel dAngers, par un arrêt remarqué du 22 février 2011, avait relaxé un conducteur en se basant sur le rapport d'étude toxicologique qui mettait en évidence le fait que le prévenu avait , certes consommé du cannabis, mais pourtant bien plus de 6 heures avant de prendre le volant. A l'instar de l'alcool, il n'était plus considéré comme étant sous son influence et ses capacités de conducteur n'était donc pas altérées.

Le Parquet s'est logiquement pourvu en Cassation contre cette décision, et la Haute Juridiction s'est prononcée sur cette affaire 8 juin 2011. Maintenant rigoureusement sa position, et mettant fin à tous les espoirs d'assouplissement, la Cour motivait ainsi sa cassation de l'arrêt de la Cour d'appel D'Angers :

"Attendu que l'article L. 235-1 du code de la route incrimine le seul fait de conduire un véhicule après avoir fait usage de stupéfiants dès lors que cet usage résulte d'une analyse sanguine ;

Attendu que, pour relaxer le prévenu du chef de conduite d'un véhicule par conducteur ayant fait usage de stupéfiants, l'arrêt retient qu'il résulte d'un consensus national de la société française de toxicologie analytique que la seule présence d'acide tétrahydrocannabinol-carboxylique ( THC-COOH ) dans le sang à un taux inférieur à 20 ng/ml de sang, comme en l'espèce, révèle que l'intéressé a fait usage de cannabis plus de six heures avant le contrôle, ce dont il se déduit qu'il n'était pas sous l'influence du cannabis lors dudit contrôle ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et du principe ci-dessus énoncé »

Cette décision n'est pas surprenante, la Cour de Cassation a toujours été inflexible dans ses décisions relatives à l'alcool et aux stupéfiants, pourtant parfois au mépris de la logique. Par bonheur, les juges du fond savent plus souvent s'affranchir du carcan de la morale pour rendre des décisions plus justes, à l'invitation des avocats.

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